Billet d’humeur
Nous sommes dans une économie de marché, un système implacable, hérité du colonialisme. Un système qui est basé sur la domination des grands, des forts, des riches sur les autres ; un système qui détruit la planète, qui pille les ressources des communautés locales, soi-disant, pour leur bien, leur développement, pour améliorer leur économie. Dans toute l’Europe et en Suisse aussi, il y a eu, et il y a, des discussions, des analyses sur le colonialisme et l’implication de la Suisse. (Voir entre autres : Colonialisme, une Suisse impliquée, Quand-la-suisse-fait-son-examen-de-conscience-colonial ).
Pourquoi l’économie et ses alliés politiques ne sont-ils pas capables d’apprendre des erreurs du passé ? Ils sont emprisonnés (et nous emprisonnent) dans une dystopie qui présente le changement « comme sombre et dangereux ». Ce narratif leur confère « une autorité totale (…) sur des citoyens qui ne peuvent plus exercer leur libre arbitre » (https://fr.wikipedia.org/wiki/Dystopie)
Cette incompétence des décideurs et des acteurs de l’économie à se remettre en question, à tirer les leçons du passé est irresponsable et fatale. Nous continuons de conclure des traités et des accords commerciaux dont l’objectif principal est de promouvoir la prospérité de la Suisse. Mais à quel prix ? Déforestation, accaparement des terres, pollution, pauvreté, migrations…
Fort heureusement, des ONG, des chercheurs et chercheuses et la société civile mettent le monde économique et politique sous pression en exigeant que notre politique extérieure soit plus transparente et démocratique, qu’elle n’impose plus à ses partenaires des conditions que l’on n’exige pas en Suisse (cf. doubles standards dans les Accords de libre-échange), qu’elle respecte les droits humains l’environnement, le climat…
En effet, nous pourrions, en Suisse, facilement adapter notre politique commerciale afin de la rendre cohérente avec le droit international, la Convention européenne des droits de l’Homme, les objectifs de développement durables, la Déclaration des Nations Unies sur les droits des paysan.nes et des autres personnes travaillant dans les zones rurales.
En ce qui concerne la politique intérieure, les forces en présence jouent aussi sur la peur et invoquent de prétendus effets néfastes pour tout changement proposé. En 2018, l’initiative pour la souveraineté alimentaire a été dénigrée et combattue par l’USP, l’industrie alimentaire et la grande distribution car elle provoquerait « une augmentation des prix des denrées, la réduction du choix des consommateurs ou encore la fermeture du marché ». (Voir : Opposants Souveraineté alimentaire et Fair Food).
Les initiatives de ces dernières années sur les sujets agricoles et alimentaires ont toutefois permis d’amener la discussion auprès du grand public et de faire bouger un peu le curseur. Nous ne devons pas baisser les bras. Des projets très intéressants existent en Suisse et dans le monde. Il faut en parler et développer, à partir de ces expériences, un narratif porteur, afin de mobiliser les mangeurs, mobiliser les acteurs et décideurs locaux pour changer le système alimentaire aux niveaux communal et cantonal et créer des filières alimentaires courtes « hors du marché ».